Je ne l’ai pas remarqué aussitôt.
J’étais
venue voir mes
amis, surtout J. que je n’avais pas réussi à voir la veille. Les
minutes passaient, les pétards tournaient, les apéros suivaient.
L’ambiance était on ne
peut plus joviale.
Il était là, allongé derrière moi, je lui tournais le dos.
Il ne parlait pas beaucoup, je l’avais à peine remarqué. Petit à petit, il est
entré dans la discussion. Il me faisait rire, il avait l’air sympa.
Je ne sais
plus comment le reste de la journée s’est déroulée, je crois bien que je ne l’ai
pas vu beaucoup. Je suis partie avec J. voir son frère, il me semble qu’on y
est resté assez longtemps. Et puis on a dû chercher quelqu’un d’assez sobre
pour nous conduire en ville, histoire de réparer une maladresse imprévue.
Une
fois rentrée, je ne me souviens pas vraiment si on est revenu sur le campement,
ni si il était là. Je ne sais plus comment nous avons sympathisé. Je criais
son nom, il me répondait en criant le mien. On rigolait beaucoup, on buvait du
rhum, on fumait des pétards, j’étais bien. Il était beau, il me plaisait. J’aimais
lui parler, j’adorais l’écouter. On a passé la nuit entière là, tous les deux.
J’étais heureuse. Je ne voulais pas dormir pour ne pas le quitter.
Le jour
commençait à se lever, je ne voulais pas que la nuit se termine déjà.
Elle venait à peine de tomber. On parlait de lui, de moi, des autres …
du
Maroc, du levé du soleil. Je ne voulais pas dormir. Je criais son nom,
il chuchotait
le mien. Il m’a regardé droit dans les yeux, et il m’a bouleversé.
J’aurai
voulu retenir le soleil, lui dire que non, qu’il ne fallait pas qu’il se lève
aujourd’hui, ni le jour suivant, qu’il ne se lève plus jamais, qu’il ne tue pas
cette nuit. Laisse-la vivre encore un peu, je t’en supplie. Fais-la durer aussi
longtemps que tu le peux. Je ne veux pas qu’elle se termine, cette nuit. Mais
il ne m’a pas écouté. Il s’est levé. Il paraît que toutes les bonnes choses ont
une fin. Cette nuit en a eu une.
On a fini par tomber de fatigue tous les deux,
il s’est allongé dans l’herbe. J’ai fumé une dernière cigarette et je l’ai
rejoins. Il m’a proposé de dormir sur sa jambe, j’ai accepté.
Une heure ou deux
plus tard, D. est venu me réveiller pour me dire qu’il partait. Je n’avais
pas le choix de repartir avec lui, S. m’attendait à Paris. Je lui ai dit
au revoir, et je suis partie.
J’espérais le revoir très bientôt...